Fin imminente d'un rêve "Viergitineux"...

Publié le par Joêl

Les 15, 16 avril 2008,

Le soleil, ce matin, éclate de toute son ardeur...
Temps, configuration idéal pour plonger. Masque, tuba, palmes, nous partons tous en rangs serrés, louvoyer entre les poissons... L'approche du rivage réserve de nouveau des surprises éblouies. Les fonds tapissés de coraux, d'anémones de mer ondoient au rythme de la houle... D'innombrables poissons rayés, jaunes, bleus, translucides, mouchetés, avancent par brusques reptations ou alors glissent d'un air indifférent près de nous. Soudain, Bernard nous fait signe de le rejoindre, un requin dormeur avance doucement dans les profondeurs.... Vite, vite... Il faut se dépêcher si nous voulons le voir, il va s'enfuir, se cacher, disparaître au milieu de la végétation sous-marine.. Le requin, apeuré, par cette armada inattendue se réfugie entre deux rochers... Nous l'observons, il n'ose plus bouger. Au départ, côtoyer de si près un tel specimen impressionne. Mais, on nous a bien dit qu'en cas de rencontre, il ne fallait pas céder à la panique, ce poisson ne représentant quasiment aucun risque. Pour se conforter dans cet état d'esprit, il suffit de consulter sur le net les archives du Museum d'histoire naturelle de Floride. Depuis 1749, les requins ne sont responsables que de dix-huit attaques mortelles dans les Antilles, dont les dernières remontent à 1972...
Nous voilà quelque peu rassurés...
Une quantité vertigineuse de poissons frayent, se faufilent au milieu de la végétation ondoyante. Nous plongeons et avançons au milieu de nuages d'argent. On a presque peur que surgisse le prédateur affamé. En milieu de parcours, nous constatons que le courant a tendance à nous entraîner inexorablement vers l'océan. Nous préférons faire demi-tour, après avoir lutté un moment, contre ce puissant courant.
Pour se délasser, une halte s'impose sur une des plages miniatures au sable d'un blanc éclatant. Sur le rivage, l'eau transparente, irradiante roule de petites vagues caressantes. On roule dans l'eau, on se laisse glisser paresseusement sur le sable aux miroitements d'éclairs vers l'écume soyeuse. Nous sautons, bondissons, rendus par la grâce de cet instant magique à notre état primitif... Les poissons glissent entre les jambes.... Une tortue, plus loin, risque un oeil interrogatif...
Arrive le moment où il faut rejoindre le bord. Nous avons prévu de jeter l'ancre, en milieu de matinée, dans le mouillage de Great Harbor pour y souscrire les formalités de sortie des îles Vierges britanniques.
Alors que nous rejoignons le bateau à la nage, quelque peu éloigné de la plage, tout en observant les fonds, nous découvrons quelques gros poissons. 
Quand j'apprends qu'il s'agit de barracudas, mon sang ne fait qu'un tour, jamais ma natation n'a été si véloce (le mousse, pas le capitaine qui ne se laisse pas effrayer pour si peu). Ces poissons aux dents aiguisées et incisives possèdent une réputation de curiosité qui ne faillit pas à la règle. Ils nous suivent à distance respectueuse... S'arrêtent quand nous arrêtons, progressons derrière nous, quand nous nageons...  
Plus tard, nos équipages, dessalés, se retrouvent au grand complet pour une dernière navigation en duo. L'ancre levée, nous rejoignons le mouillage de Great Harbor. L'eau, couleur menthe verte intense, plombée par un soleil puissant, est tout simplement superbe. 
Bernard et Capt'ain Joe vont s'acquitter des formalités pendant que je prépare les bières glacées. Sitôt le déjeuner avalé, nous partirons. Il est déjà temps de rejoindre Saint-Martin. Jean-marie, le co-équipier de Joël arrive le 17 avril.
Dés 14 H, nous relevons l'ancre, et partons à regret de ce mouillage aux airs langoureux, tellement tentateur...
Nous aurions apprécier y jouer les prolongations...
Avant de rejoindre la haute mer, nous circulons, en tirant des bords, au milieu des îles au rythme d'un parcours pittoresque, nous faisant profiter une dernière fois de la splendeur de ces contrées au passé légendaire.
Génois à poste, Grand-Voile arisée, moteur pour avancer au près serré. C'est le déploiement des grands moyens... Nous voulons sortir de l'archipel avant la nuit, surveiller les passages difficiles, identifier les casiers à fleur d'eau... Nous laissons les lumières de Tortola sur notre bâbord et progressons au milieu de l'obscurité... La navigation ne va pas être de tout repos. Le vent, Sud-Est, est positionné en plein dans notre nez. Les vagues courtes et cassantes freinent considérablement notre progression. Nous établissons un programme. Nous virerons de bord toutes les demi-heures pour commencer et ensuite, nous allègerons la cadence et règlerons cette manoeuvre toutes les heures...
Le capitaine assure son quart, dans une mer difficile, pendant que le mousse commence à perdre ses moyens dans la nuit. Le mal de mer, pernicieux, insidieux, anéantit !!
 Le bateau poursuit sa route cahin-caha, poussé, cravaché, cinglé par la main experte d'un capitaine qui, lui aussi, va finir par se fatiguer par tant d'efforts, assumé seul. Sur la route de la houle, il faut de nouveau mettre le moteur, en complément des voiles pour se pousser, "envisager" d'avancer... Il faut même refaire le plein de gasoil, en plein océan... Attraper le bidon dans les coursives, préparer le matériel, verser le précieux liquide, sans en perdre une goutte, dans les soubresauts maritimes... Une sacrée paire de manche (renouvelée à deux reprises)... Non seulement le vent contraire, nous donne presque l'impression de reculer au lieu d'avancer, mais le courant contraire lui aussi s'en mêle... Quelle adversité... Puis, petit à petit, trés lentement... dans la soirée du 16, se précisent les contours de l'île d'Anguilla... Les lumières de Saint-Martin... dans la nuit noire...ponctuée d'étoiles.
L'approche du mouillage représente un soulagement extrême... Enfin la mer se calme.. Le vent ne nous repousse pas de sa main de fer implacable... En contournant les bateaux, nous croisons Notre-Dame des Flots et le saluons au passage.
Nous trouvons une place tout à fait correcte au milieu de la baie de Marigot (bon bien-sûr, ça n'est pas le lac procuré par la proximité de la digue, mais c'est mieux que ce que nous venons de traverser et de subir). L'ancre est lâchée... Nous goûtons à la paix, au repos... Quel contraste saisissant... avant d'aller s'écrouler dans un sommeil d'oubli total... 
141 milles effectués dans un prés serré (véritable partie de bras de fer)  en 27 heures.... 



 
    

 

Publié dans Souvenirs marquants

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